Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/323

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qu’Octave avait eus dans toutes les compositions ! Il n’avait manqué qu’une fois à obtenir la première place. Quoique ce résultat, qui n’était qu’une addition de points, fût mathématique, et que, par conséquent, je l’attendisse, aussi certainement que mon oncle lui-même attendait une éclipse de lune annoncée par l’Observatoire, je ne pouvais m’y habituer, ni accepter cette constante défaite. Ce mauvais sentiment de révolte fut si fort en moi que je feignis une maladie, pour ne pas me rendre à la classe du Samedi Saint, où le proviseur devait lire la liste des lauréats. Je sentais que je n’aurais pas la force de me contenir. Je passai toute la matinée dans mon lit, me plaignant de douleurs à la tête, qui guérirent comme par enchantement lorsque mon oncle parla d’envoyer chercher le docteur Pacotte. Je redoutais la pénétration de ce vieillard qui, maintenant et à mesure que grandissait en moi l’odieuse passion, me montrait un visage presque toujours sévère… Cette scène m’est présente comme si elle datait d’hier, car elle allait donner lieu à la vilaine action dont je vous ai parlé, et qui, dans le naïf domaine des sensations enfantines, équivalait à une véritable scélératesse. Je me vois donc, aussitôt que mon oncle eut prononcé le nom du docteur, disant que ce n’était pas la peine, et que déjà je me trouvais mieux. Le peu perspicace mathématicien n’eut même pas le temps de s’étonner de cette guérison subite, car, juste à la seconde où je me mettais sur mon séant pour me lever, un coup de sonnette se fit entendre, joyeux et précipité. — « Qui