maladie de l’un ou de l’autre, je leur imposerai une vraie domestique. D’ici là, j’ai peur, en dérangeant leur train de vie, même un peu, de déranger leur santé. Ma mère surtout ne supporterait pas d’être contrariée. Tu sais mes anciennes craintes sur elle. Je vois qu’elle se ronge toujours, et à propos de tout. Mon père en ressent le contre-coup. Ils trouvent le moyen de n’être pas heureux, de si braves cœurs ! Décidément, non, il n’y a pas de Providence… »
Au commencement de cette année 1882, la situation s’était pourtant modifiée. Eugène avait manifesté le désir de quitter la rue Amyot, en prétextant la nécessité de s’établir. Ce fut le premier heurt sérieux entre le fils et ses parents. Après avoir approuvé sa résolution, l’avoir aidé dans sa recherche d’un nouveau gîte, avoir présidé à son emménagement, le père et la mère déclarèrent tout d’un coup qu’il leur était trop pénible de renoncer au logis qu’ils occupaient depuis trente ans déjà, et leur résolution fut invincible. A la clarté des faits que j’ai connus plus tard, je comprends que cette volonté des vieux Corbières enfermait une idée d’expiation suggérée par la femme. Dans l’ignorance de la faute dont la secrète honte dévorait ce ménage, en apparence irréprochable, comment expliquer cet entêtement, sinon par la manie ? Le médecin n’y manquait pas. Mais déjà le soupçon que l’état moral de ses parents cachait un mystère se levait en lui, vaguement. Il sentait chez eux un parti pris de ne point s’associer au bien-être qu’allait