ses ordres depuis des années. Se sentant malade, il lui confia la somme qu’il avait pu distraire de sa fortune et qu’il estimait nécessaire à l’achèvement de mes études… Trente-cinq mille francs, si j’ai bien calculé… » — « Et M. Corbières se serait attribué cet argent ? » interrompis-je. « Mais c’est impossible… Pourquoi ? Je les ai vus vivre, lui et sa femme. Ce sont les gens les plus simples, les plus droits, les plus braves. » — « Ces braves gens m’ont tout de même dépouillé, » ricana Pierre Robert, en hochant la tête, et sa bouche exprimait le plus amer des dégoûts, celui du méprisé qui peut devenir à son tour méprisant. « Pourquoi ? Oui, pourquoi ? Mais leur fils, monsieur, comment l’ont-ils élevé ? Il a pu faire son volontariat d’un an, lui. Il a suivi ses cours de médecine, lui. Et avec quel argent ? Un homme qui est huissier dans un ministère, ça n’a pas de fortune pourtant. Et ce serait sur ses économies que celui-ci aurait mis de côté de quoi garder son fils étudiant jusqu’à trente ans ? Allons donc !… C’est mon argent, je vous le dis, qu’ils ont dépensé, vous entendez, mon argent… » — « Mais vous-même, vous avouez que vous n’avez pas une preuve de ce que vous dites là, » protestai-je, et, tout en protestant, j’étais accablé par l’évidence qu’il ne mentait pas. Ses paroles étaient comme la grille posée sur une page d’écriture chiffrée et qui permet d’en lire le sens tout d’un coup… Les impressions que j’avais eues si souvent
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