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L’ÉCUYÈRE


PREMIÈRE PARTIE



I

UN COIN D’ANGLETERRE RUE DE POMEREU

Tous les amateurs de chevaux, qui pratiquaient ce noble sport il y a trente ans et qui lui demeurent fidèles en dépit de l’automobile, se rappellent, avec un regret jamais consolé, M. Robert Campbell, Bob Campbell, l’importateur breveté des poneys du pays de Galles, le rival des Bartlett et des Hensman, le gros Bob, enfin. Il fallait le voir descendre les Champs-Élysées, dans son tonneau, avec son rouge visage, rasé de près, où luisaient des yeux d’un bleu si clair. La bête qu’il menait — rarement la même — était toujours un petit animal, bâti en hercule, qui mesurait un mètre trente-deux, trente-cinq — « treize mains », disait-il dans son français traduit de l’anglais, — et elle allait, elle allait, dévorant l’espace de ses membres courts… Le gros Bob était vêtu, hiver comme été, d’un complet coupé dans une de ces étoffes rudes qui sentent la tourbière