Aller au contenu

Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

convenir… Il faut que vous lui écriviez, papa… N’est-ce pas vrai, Jack ?… » Elle lança du côté de Corbin, en posant cette question, un tel regard, d’une si impérieuse et si suppliante insistance, tout ensemble, que le malchanceux écuyer, interpellé de la sorte, en demeura littéralement médusé. Cette injonction, pour lui fantastique, lui mit aux lèvres un cri de surprise qui s’étouffa dans une espèce de grognement, lequel pouvait, à la rigueur, passer pour un « oui ». Bob Campbell, du moins, l’interpréta de la sorte. Un sourire de sympathie éclaira sa face rasée. C’était là une preuve, après tant d’autres, et du degré où il ignorait la crise traversée par sa fille, et de l’art avec lequel ce Jules, si ingénieusement subtil, avait su le prendre, comme tous ceux dont il s’occupait.

— « M. le comte de Maligny ?… » s’écria-t-il. « All right ! Je serai content de le revoir, et je suis content qu’il ne nous ait pas oubliés. Tout de même, ces Français sont étonnants. Drôle de lot ! Drôle de lot ! » (Vous reconnaissez le funny lot, synonyme du non moins elliptique funny sort, déjà commenté.) « Je vais, de ce pas, lui écrire qu’il vienne demain matin, s’il le peut, et que j’ai son affaire… »

L’action suivant la parole, toujours en vertu du pratique proverbe sur la valeur monétaire du temps, Campbell se dirigea vers le bureau, non sans que le neveu eût esquissé un geste qui voulait être une protestation. Mais Hilda l’arrêta net, en lui touchant le bras de la pointe de sa cravache ; et, marchant sur lui, elle dit, d’une voix basse et saccadée :

— « Si vous voulez que je vous pardonne, Jack, il faut vous taire… Vous m’entendez, vous taire. Sinon, je croirai qu’en me parlant comme vous l’avez fait ce matin, vous m’avez menti… »

— « Hilda !… » gémit Corbin, avec un accent de