Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/274

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détestables dès le premier jour. Il brisa cet entretien et n’essaya plus de le recommencer dans les trois jours qui lui restaient pour agir, avant la chasse. La conscience de sa maladresse le paralysait, en même temps qu’il se désespérait devant cette évidence : Hilda était dans une de ces crises où les pires folies sont probables. Comment allait-elle se comporter, durant cette chasse ? Pourquoi ce soudain revirement de sa volonté, alors qu’elle n’avait changé d’opinion ni sur Maligny, ni sur son propre devoir ? Ces points d’interrogation se posaient devant l’obscure intelligence de John Corbin, sans qu’il imaginât même une réponse. Ces soixante-douze heures s’écoulèrent dans cette angoisse, si douloureuse d’inefficacité, qu’il éprouva presque un soulagement quand l’instant du départ pour la chasse approcha. Un événement allait se produire, quelqu’il fût, — par suite, une solution. Ils s’étaient, la jeune fille et lui, évités d’un commun accord, durant tout ce temps. Ils sentaient trop qu’ils ne pouvaient se parler qu’en se faisant du mal. Dans le train qui les emportait vers Rambouillet, Corbin osa enfin interroger de nouveau sa cousine. Il avait tremblé, jusqu’au dernier moment, ou qu’elle ne lui permît pas de l’accompagner, ou que Bob Campbell ne lui donnât la commission d’aller présenter une bête ailleurs. Le contraire était arrivé. L’oncle avait dit au neveu :

— « Faites envoyer à Rambouillet le Norfolk que nous avons à vendre, Jack. Vous le monterez. Si cette Mme Tournade n’est pas satisfaite des deux autres chevaux, peut-être aura-t-elle l’idée de prendre celui-là, un Norfolk pour la selle, c’est rare. Il s’habituera toujours un peu à la trompe et aux chiens… »

Hilda n’avait pas protesté contre ce projet. Les trois chevaux avaient été expédiés, la veille, sous la surveillance d’un lad, et Corbin se trouvait assis