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Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/275

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vis-à-vis de sa cousine, vers les sept heures du matin, — un matin voilé d’automne qui annonçait une tiède et claire journée, — dans le compartiment du chemin de fer. Il lui demanda tout d’un coup : — « Vous savez, Hilda, que, si vous voulez ne pas chasser, il est encore temps. J’ai donné l’ordre à Dick qu’il emportât deux selles d’homme, pour le cas où vous vous raviseriez. Il monterait le Norfolk, et, moi, j’accompagnerais Mme Tournade. Vous diriez à votre père que vous vous êtes sentie souffrante, et vous rentreriez par le prochain train… »

— « Non, » répondit-elle en secouant la tête après une visible hésitation.« J’ai besoin de le voir en face d’elle. » Et, avec ce même accent profond, presque de honte, qu’elle avait eu déjà lors de leur dernier entretien intime, elle ajouta : « Et puis, l’autre sera peut-être là. »

Sous le coup d’une pareille confidence, et qui lui révélait des mystères insoupçonnés dans ce cœur si malade, de quel regard Corbin parcourut les groupes de chasseurs, quand Hilda et lui arrivèrent au rendez-vous de l’équipage de Montarieu. Il ne lui fallut pas une minute pour reconnaître et Maligny, monté sur Galopin, — et Mlle d’Albiac, en selle aussi et manœuvrant, avec une habileté digne de Hilda, une jument rouanne un peu nerveuse, — et Mme Tournade, en amazone, la cravache à la main, qui attendait, assise dans une victoria. Sur le siège, se trouvait maître Gaultier, grotesquement flanqué d’un postillon poudré ! Les deux chevaux de l’écurie Campbell, tenus en main par le lad Dick, piaffaient à côté. Le brouillard s’était un peu levé. Des coins de ciel bleu paraissaient par places, dans l’interstice des nuages légers qui floconnaient au-dessus de la forêt. Elle serrait ses futaies fauves à la droite du groupe de chasseurs, massés devant la porte d’entrée d’un petit