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Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/309

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descendue pour arranger ma selle dont la sangle se détachait. J’ai été attaquée par un homme armé qui m’aurait tuée. M. de Maligny passait. Il a sauvé ma vie au péril de la sienne. Vous verrez encore, à sa main droite, la cicatrice de la blessure qu’il s’est faite en saisissant la lame du couteau de ce brigand… Voilà l’histoire de nos rapports, mademoiselle, et c’est le secret de l’affection que je lui porte… J’ignorais, avant aujourd’hui, que cette affection eût été calomniée. Il paraît qu’elle l’a été. J’en suis d’autant plus peinée que M. de Maligny a été, avec moi, d’une réserve irréprochable… Nous sommes sortis souvent au Bois ensemble à cheval, comme cela m’arrive, d’ailleurs, sans cesse, avec les clients de mon père. Il s’est toujours montré aussi respectueux que les plus respectueux… Ces promenades, sans doute, auront été rapportées à Mme Tournade, — ou à quelqu’un d’autre. Car je répugne quand même, en y réfléchissant, à croire qu’une personne de sa condition ait pu, sur de tels indices, calomnier une jeune fille qui n’a au monde que son honneur… »

— « Je vous crois, miss Campbell, » répondit Louise d’Albiac. L’accent dont Hilda avait prononcé le mot « honneur » était si sincère, si émouvant qu’elle ne doutait plus. Pourtant, elle reprit, avec une nouvelle et visible hésitation : « Oui, je vous crois et je vous prie de m’excuser si je vous ai forcée de me parler… Mais je voudrais que vous me permettiez de vous poser une question encore… »

— « Toutes celles que vous voudrez, mademoiselle, » fit Hilda… « Si je ne peux pas répondre, je vous dirai que je ne peux pas répondre… »

— « Hé bien ! » interrogea Louise, les paupières baissées sur les yeux, comme si elle avait honte de cette inquisition presque insultante maintenant, « s’il en est ainsi, — et remarquez que je suis sûre