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Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/64

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Elles impliquent une frivolité d’habitudes qui ne laisse pas la moindre place à la réflexion sérieuse, et tel héritier d’un titre illustre, dont l’intelligence eût été capable de talent, s’éparpille en papotages dignes des caillettes qui les provoquent et y répondent. Puis, la mère, qui a été une grande chrétienne dans son coin et pour son compte, s’étonne avec désespoir, lorsque le monde pour lequel elle a dressé son fils lui renvoie un échantillon accompli de ses vénalités et de ses égoïsmes, de ses cynismes et de ses dissipations.

Cette histoire, moins commune à présent que ces éducations aristocratiques se font de plus en plus rares, était, ou allait être, celle de Jules de Maligny, quand le hasard d’une rencontre romanesque mit Hilda Campbell sur son chemin. C’est assez dire que la jeune fille ne devait pas marquer ce jour d’avril d’un caillou blanc, comme disaient joliment les poètes anciens. Déjà, ce goût de la vie élégante, imprudemment caressé chez son fils par la douairière, avait porté ses premiers fruits, puisque le jeune comte s’était vu obligé de déclarer cette grosse ardoise au Cercle — imitons son langage — qui avait déterminé l’exil en Provence. Mais Jules était, malheureusement pour le repos de Hilda, tout autre chose qu’un simple mauvais sujet. Un trait singulier de sa nature le rendait plus dangereux que n’eût été la précoce corruption d’un viveur élégant de vingt-cinq ans. Cette goutte de sang slave, qui donnait à sa physionomie cette langueur, tour à tour, et cette mobilité entraînante, faisait de lui un personnage également déconcertant, et dans le Paris archaïque où il avait grandi, et dans le Paris ultra-moderne où il évoluait, de par l’enchaînement de ses relations. Sa mère n’avait pas calculé non plus qu’un garçon, très à la mode dans un petit cercle, ne