Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/96

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

raconté… Voilà tout… Faut-il lui courir après, comme la première fois ?… À quoi cela servirait-il ? À l’exaspérer davantage, si elle est vraiment froissée… Mais comment la revoir, maintenant ?… Parbleu ! J’irai chez son père, comme si de rien n’était, à moins qu’elle n’aille se plaindre au vieux Campbell que je lui aie manqué de respect ?… Pour deux ou trois compliments un peu soulignés, a-t-elle pris la mouche ! L’a-t-elle prise !… C’est ce qu’on appelle filer à l’anglaise, ou je ne m’y connais pas. Avant d’aller plus loin, il est indispensable que j’aie pris des renseignements sur elle comme j’en avais l’idée. J’aurais dû commencer par là. Décidément, je vais toujours un peu fort. Qui pouvait deviner qu’elle ne rendrait pas ? Elle avait tellement l’air de donner dans la main… C’est incompréhensible… Mais, avec les Anglaises, tout arrive. » Et, à voix haute : « Nous allons rentrer, mon brave Galopin. Toi, du moins, tu auras gagné à cette affaire… »

Galopin, comme s’il eût compris cette promesse qu’il n’aurait plus à s’époumoner en un train trop dur, s’était mis au petit trot. C’est avec cette modeste allure, qui n’avait plus rien de triomphant, que le descendant « d’une race de soldats », — comme il s’était appelé lui-même assez sottement, — s’achemina vers l’hôtel de la rue de Monsieur.

Son sens inné du cœur féminin le lui avait très justement fait comprendre : la pire imprudence, en cette minute, eût été une visite immédiate rue de Pomereu, même pour des excuses. Il avait donc pris par la porte de la Muette et longé l’avenue Henri-Martin, afin de gagner, de là, le Trocadéro, le Cours-la-Reine, le pont Alexandre et la place des Invalides. Une allée cavalière est ménagée sur ce parcours, mais elle a plusieurs carrefours à traverser, que des tramways électriques rendent assez dangereux. Si