Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/105

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restait dans cette campagne ou si elle voyageait, si elle revenait à Paris maintenant de temps à autre ou si elle avait renoncé tout à fait à ce séjour. Quoi qu’elle fasse, se disait-il, elle fait le mal. Elle lui apparaissait comme une créature d’une perversité profonde et implacable. Et voici qu’il venait d’apprendre qu’elle était là, — qu’elles étaient là, toutes deux, elle et son enfant, à deux pas de Mme Scilly et d’Henriette. Monstrueux voisinage dont l’idée l’affolait davantage à mesure qu’il prenait et reprenait ces scènes de sa vie de fautes et de souffrances, presque absolument oubliées depuis son entrée dans le doux et frais Éden de son pur amour ! Et toujours il se heurtait à cette question : — « Que veut-elle ?… Évidemment elle a su mon mariage prochain et mon séjour ici… Est-ce une vengeance ?… » La démence de son horreur pour cette ancienne maîtresse était telle qu’il allait plus loin : — « Est-ce un projet d’exploitation ? En serait-elle descendue à cette bassesse ? Serait-elle venue à Palerme avec la pensée d’un chantage au moyen de l’enfant ?… » Il ne trouvait plus en lui la force de faire le raisonnement bien simple que Pauline, s’étant tue des années, n’avait aucun motif pour commencer aujourd’hui à le tourmenter. Il ne voyait que cette présence et il continuait d’en être bouleversé à la folie, jusqu’à ce qu’ayant pris une photographie d’Henriette,