Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/119

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hypothèses, il était urgent qu’il prît l’avance et qu’il sût avec certitude si elle voulait la guerre ou la paix. Il parerait le coup si elle avait jamais l’idée de le frapper, comme elle pouvait le faire, en torturant sa chère fiancée par une dénonciation anonyme ou d’anciennes lettres de lui communiquées. Si au contraire ce dangereux voisinage devait être absolument inoffensif, une fois certain de cette innocuité, il n’y penserait même plus. C’est alors et devant l’évidente nécessité d’une explication, que Francis avait conçu l’idée de la démarche la plus étrange, la plus capable de poser tout de suite les relations forcées que lui imposerait la présence de Mme Raffraye sur leur vrai terrain. Il s’était décidé à lui écrire. Que risquait-il ? Éviter la cruelle impression de sa présence, il ne le pouvait pas. Tôt ou tard il lui faudrait maintenant se trouver face à face avec Pauline. En provoquant au contraire cette rencontre, il y gagnerait non seulement d’être fixé lui-même sur elle, mais de la fixer, elle, sur son pouvoir, si elle s’imaginait en conserver sur lui. Il y avait encore, dans l’espèce de fièvre d’action que prouvait cette démarche, un autre besoin si secret et si obscur qu’il ne se l’avouait pas, celui de se convaincre que les troubles d’incertitude qui avaient grondé autrefois en lui à la pensée de la petite fille de Mme Raffraye, n’existaient plus. Il avait donc pris son papier et sa plume.