Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qui n’en étaient pas encore. Il semblait que la maladie, en touchant à cette beauté autrefois idéale, l’avait fanée comme avec pitié, tant la mourante gardait de séduction féminine. C’était une poitrinaire, une condamnée, et c’était toujours ce charme de sveltesse élégante qui la faisait comparer par Francis autrefois aux fragiles statuettes de Tanagra. Triste présage et trop juste, car ces statuettes-là étaient destinées par les anciens aux tombeaux, et l’enveloppement frileux de tout le corps de Pauline dans sa longue mante, malgré le soleil, la meurtrissure de ses paupières, le tremblement de ses lèvres, la toux aussi dont elle fut secouée pour avoir marché un peu, disaient assez que ce dernier reste délicieux de grâce appartenait déjà à la mort. Elle-même le sentait sans doute. Il y avait une passion trop profonde, comme une fièvre dans le regard dont elle enveloppait sa fille à mesure qu’elle en approchait. Et pourtant elle avait gardé de la jeunesse dans sa maternité douloureuse, car, en souriant, elle fit un geste de silence à la bonne et elle put ainsi arriver à côté d’Adèle sans que cette dernière l’eût entendue venir. Elle posa sa main sur la chevelure de l’enfant qui se retourna, comme elle avait fait l’autre jour sous la caresse d’Henriette, d’un mouvement farouche. Elle vit sa mère, et l’illumination de toute sa physionomie, la pieuse ardeur avec laquelle elle prit la main