Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/171

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sentiment particulier. Sa pâleur ne s’était ni décolorée davantage, ni empourprée de sang. Ses lèvres n’avaient pas frémi. Seulement celle de ses mains qui, en ce moment, continuait de boucler les cheveux de l’enfant, s’arrêta de ce geste pour les serrer, et, de l’autre, elle l’attira contre elle, comme pour la défendre. Il n’est besoin ni de violentes explosions, ni de grandes phrases, ni d’un déploiement furieux d’énergie pour que deux êtres qui se retrouvent ainsi face à face après des années, sentent les émotions les plus poignantes du drame passer entre eux. Pauline et Francis s’étaient reconnus, — et cela suffit pour qu’un quart d’heure plus tard, quand il s’arrêta devant la porte du Jardin Anglais dans le landau de Mme Scilly qu’il était allé reprendre en hâte, le jeune homme eût encore un tremblement dans tout son corps. À peine se tenait-il debout. Qu’elle était cruellement juste la phrase qu’il se prononçait à lui-même en descendant de la voiture et lorsqu’il vit la silhouette de sa fiancée se dessiner, souple et gracieuse dans une toilette claire, entre les fûts élancés des verts palmiers : « Pauvre, pauvre Henriette ! »