Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/219

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aimait le plus au monde. Son affection l’éclairait, comme il arrive quelquefois à cet âge, sur des périls de santé dont son intelligence ne pouvait pas se rendre compte. Pourtant elle avait bien tout entendu, car elle reprit, après un silence ;

— « Pardon, mademoiselle, est-ce que votre maman a dû garder le lit longtemps ?… »

— « Des semaines, » dit Henriette.

— « Pardon encore, » continua l’enfant, « c’était un froid ici ?… » et elle montra sa poitrine.

— « Oui, » répondit Henriette.

— « Et elle toussait beaucoup la nuit ? »

— « Beaucoup. »

— « Et elle est restée combien de temps à Palerme avant d’être guérie ?… »

— « Mais il n’y a pas deux mois que nous avons quitté Paris… »

Une seconde fois Adèle se tut. À quel travail se livrait son imagination, tandis que les chanteurs continuaient de faire courir, sur cette banale assemblée de touristes, de désœuvrés et de malades, l’ardent frisson de vitalité populaire que dégagent, malgré tout, les moindres romances écloses dans le sable fumeux du Vésuve ? La petite fille paraissait s’être en allée loin de cette salle, de ce spectacle, de ce public et de ces chanteurs. Mais comme c’est l’habitude lorsque nous entendons de la musique sans l’écouter, les mélodies se mélangeaient à sa rêverie, pour en