Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/237

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un vaporisateur à moitié vide, dont la présence expliquait le léger arome ambré de l’atmosphère. On eût deviné, à ces riens, un de ces tendres esprits de femme dont la résistance à la douleur se hausse jusqu’à l’héroïsme par le désir passionné de ne pas abdiquer la royauté du charme, — instinct si touchant, comme toutes les impuissantes protestations de la faiblesse et de la beauté contre la barbarie de la vie ! Il l’était plus encore ici, car c’était la mère qui se sentait mortellement atteinte, et elle voulait laisser à son enfant, au lieu d’une vision de laideur et d’épouvante, cette image de souffrance et de grâce à la fois, le souvenir d’une femme pâlissante, consumée, mais sans dégradation. Et combien elle l’aimait, cette enfant, les cinq ou six portraits épars dans la chambre, sans compter celui qu’elle gardait près d’elle, le disaient assez. C’était encore de sa fille qu’elle s’occupait durant cette veillée de Noël employée en partie à préparer des cadeaux destinés aux petits souliers qu’à son retour Adèle poserait dans le coin de la cheminée. Elle venait d’envelopper ainsi et de confier à Catherine, celle des deux femmes de chambre demeurée auprès d’elle, toute une suite de menus paquets liés de faveurs. Ils contenaient à la fois des gâteries de jeune fille, telles qu’une pendule de voyage, et de toute petite fille, telles qu’une chaise à bascule, pour une poupée. Mais Adèle, élevée dans des