Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Cette délicate légende de l’antiquité romanesque avait tant plu à Pauline Raffraye !… — Elle entendit la porte de l’étroit vestibule qui précédait sa chambre à coucher s’ouvrir de ce mouvement doux, si contraire à l’habituelle brusquerie des enfants, et elle y reconnut la manière d’Adèle. Une précoce sollicitude pour sa mère faisait de cette petite fille, dans cet âge de vivacité où le geste suit la pensée avec une violence toute spontanée, une mignonne fée silencieuse, une elfe au pas à peine appuyé, qui allait, qui venait, sans jamais révéler sa présence par un bruit trop fort et dont pussent souffrir les nerfs de la malade. Cette surveillance continue, presque involontaire, de ses moindres gestes, était une caresse déjà pour la mère. Il semblait que l’enfant prît comme un soin d’annoncer son approche par une grâce d’attention et de ménagement. Un coup presque timide frappé à la seconde porte, et Adèle entra dans la chambre à coucher, avec une tendresse que disaient et ses prunelles brunes et son fin visage, et son sourire et tout son être d’où il émanait comme une idolâtrie. À cette expression, dont elle s’illuminait chaque fois qu’elle revenait après une absence longue ou courte, il était visible qu’elle ne vivait pas seulement pour sa mère. Elle vivait de sa mère. Quoiqu’elle arrivât d’un spectacle qui l’avait intéressée sincèrement et qu’elle tînt dans ses bras la poupée sicilienne dont elle était amoureuse,