Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/394

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et qu’est-ce que cette grâce, que ce don de la paix profonde qui nous rend heureux dans le brisement des instincts fondamentaux de l’être humain ? La science, de quelque nom qu’elle s’appelle, qui réduit l’existence morale à un mécanisme, en est encore à répondre à ces questions. Elle détermine des suites d’idées. Elle précise des conditions physiques. Puis elle se trouve obligée, en toute sincérité, de dire qu’elle ignore, devant des phénomènes qui ne tiennent cependant ni de la folie ni de la maladie, puisqu’ils s’accompagnent de l’équilibre entier de la raison, de l’absolue lucidité intellectuelle et quelquefois du complet rétablissement physique, comme ceux que produit dans les âmes croyantes la pratique de certains sacrements. Quand Henriette se trouva dans le coin de la chapelle du Dôme, où elle avait voulu communier, agenouillée, le front dans ses mains, avec cette impression d’une conscience lavée par l’absolution de ses moindres péchés, avec cette autre, plus forte, souveraine, de s’être nourrie de la chair et du sang de son Dieu, il se fit en elle comme un ruissellement de lumière. Le flot d’une infinie tendresse l’envahit, et dans cet état d’indicible ferveur, avec ce sentiment d’une présence en elle, étrangère à elle et unie à elle, qui la prenait toujours après la communion, elle fut comme ravie dans la joie d’une de ces demi-visions qui tiennent le milieu