Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/78

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très naturel qu’il ne la rencontrât pas seule. Il n’était pas moins naturel, après ce qu’elle lui avait dit l’autre jour, que la même idée de visite fût venue au baron de Querne. Ce fut à ce dernier que se heurta par hasard Francis. Un peu d’embarras dans l’attitude et dans le regard de Pauline, un peu de familiarité dans la conversation de la part d’Armand, et des allusions à de menus événements de leur société que Nayrac ignorait, — il n’en fallut pas davantage pour qu’une fois demeurés en tête-à-tête, les deux amants se trouvassent vis-à-vis l’un de l’autre dans un silence gros de tempêtes. Pauline essaya de le rompre la première en se levant, et, s’approchant de Francis pour lui prendre la main :

— « Que vous êtes gentil d’être venu ! » dit-elle. « Je ne m’attendais pas à cette bonne surprise. »

— « Je m’en suis bien aperçu, » répondit-il durement en se dérobant à cette caresse amicale.

— « Comment me parles-tu ainsi ? » dit-elle avec tristesse. « Je comprends bien. C’est parce que tu as trouvé chez moi M. de Querne ? Mais, si j’avais consigné ma porte, on ne t’aurait pas reçu non plus et nous n’aurions pas ces quelques minutes à nous. Ne me les gâte pas, ne nous les gâte pas… »

— « Pourquoi aviez-vous l’air si troublé alors ? » reprit-il.