Page:Bourget - Les Deux Sœurs, Plon-Nourrit.djvu/200

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les soudaines ruptures de relations cachent presque toujours un mystère… Si l’on a remarqué vos assiduités, on ne remarquerait pas moins votre absence… On en chercherait la raison dans une brouille… À cause de quoi ? … Ma sœur n’est pas de celles dont on peut incriminer la conduite… Il ne restera qu’une hypothèse, la plus naturelle… » Cette fois, son intonation était moins ferme, pour conclure : « Car enfin, un honnête homme, et je sais combien vous l’êtes, ne peut pas avoir eu deux motifs pour s’intéresser à une jeune femme du moment qu’il est libre et qu’elle est libre… »

– « Je crois vous comprendre, madame, » répondit Brissonnet, après un nouveau silence. « En effet vous avez dû croire cela de moi. Je l’aurais cru moi-même d’un autre. Mme de Méris est veuve. Elle est charmante. Tout homme serait fier, d’être distingué par elle et de lui donner son nom. Il eût été trop naturel que cette ambition fût la mienne… » Puis, d’une voix assourdie, il continua : « Je ne l’ai pas eue… Maintenant que vous me parlez, mes yeux se dessillent. La vérité de ma situation m’apparaît… Mes assiduités auprès de Mme de Méris semblaient traduire des sentiments que je n’avais pas pour elle. Je professe à son égard le plus profond respect. Mais, je ne l’aime pas et je n’ai jamais pensé qu’elle pût me faire l’honneur de m’accorder sa