Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/478

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cherchant ses lèvres pour un baiser. Il eut l’énergie de la repousser.

— « Non, » disait-il, « je ne veux pas… »

— « Ah ! » gémit-elle en se tordant les bras, « tu y crois donc toujours, à ces abominables soupçons ! … Et tu n’es pas venu, et tu m’as condamnée ainsi sans m’entendre ! … Et quelles preuves avais-tu pourtant ? … De m’avoir vue sortir d’une maison ! … Et pas un doute en ma faveur, pas une seule des vingt hypothèses qui pouvaient plaider pour moi ! … Si je te disais pourtant que dans cette maison habite une amie malade, que j’étais allée voir ce jour-là ? … Si je te disais que la présence de l’autre personne, dont la vue t’a rendu fou, avait la même cause ? Si je te le jurais sur ce que j’ai au monde de plus sacré, sur… »

— « Ne jurez pas, » interrompit René durement, « je ne vous croirais pas, je ne vous crois pas… »

— « Il ne me croit pas, même maintenant ; mon Dieu ! Que faire ? » Elle marchait, à travers la chambre, en répétant : « Que faire ? Que faire ? » Durant toute cette semaine, elle avait tourné et retourné cette idée qu’il pouvait cependant être assez irrité contre elle pour ne pas la croire. Qu’il lui restât un soupçon, un seul, et elle était perdue. Il la suivrait de nouveau ou la