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Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/499

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par le Christianisme. Telle était, d’après ce robuste ouvrier de la vie morale, la tâche réservée dans notre époque à tous les hommes de bonne volonté. Claude n’ignorait pas non plus quelles espérances ce prêtre, vraiment supérieur, avait placées sur son neveu. Que de fois il l’avait entendu qui disait : « La France a besoin de talents chrétiens ! … » Aussi le regardait-il avec une curiosité singulière, étudiant sur ce visage si calme d’habitude un passage d’anxiété, — il aurait presque voulu de doute. Ils marchaient sur le trottoir de la rue d’Assas, et ils allaient franchir la rue de Rennes, quand l’abbé s’arrêta pour interroger son compagnon :

— « Ma nièce m’a dit que vous connaissiez cette femme qui a poussé mon neveu à cet acte de désespoir. Dieu n’a pas permis que ce pauvre enfant disparût ainsi. Le corps guérira, mais il ne faut pas que l’esprit retombe… Qui est-elle ? »

— « Ce que sont toutes les femmes, » répondit l’écrivain qui ne put résister au plaisir d’étaler devant le prêtre sa prétendue connaissance du cœur humain.

— « Si vous aviez confessé, vous ne diriez pas toutes les femmes, » interrompit le prêtre. « Vous ne savez pas ce que c’est que la Chrétienne et jusqu’où elle peut aller dans le sacrifice… »

— « Ce que sont presque toutes les femmes,