Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/108

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elle les définissait dans sa pensée des femmes obligées de mentir. Elles trompaient. Elles trahissaient. Voici donc que cette idée de mensonge, avec tout ce que ce mot comportait pour sa loyauté de dégradation avilissante, commençait de s’associer à l’idée de cette mère idolâtrée jusqu’ici avec la plus aveugle, la plus fervente dévotion, et, au même moment, tandis qu’étendue à terre, elle agonisait de cette double souffrance, une troisième blessure s’ouvrait en elle, dont la peine se fit tout d’un coup si aiguë, si lancinante, qu’elle se redressa sur ses mains, dévorée par cette nouvelle et suprême angoisse. Elle venait de se demander quel sang coulait dans ses veines, puisque ce n’était pas le sang de Nortier ; quel homme avait été le complice de la faute de sa mère, — de qui elle était la fille ? ,.. Et, les yeux fixes, le buste en avant, elle se prit à répéter tout bas, comme si elle n’entrevoyait déjà que trop la réponse : — « Qui est-ce ? » Elle demeura ainsi - combien de temps ? elle n’aurait su le dire - à essayer d’y voir clair dans les pensées qui tourbillonnaient dans son cerveau. A la fin de cette méditation, dont l’