Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/115

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également frivoles et insignifiantes, les originalités des natures sont bien difficiles à discerner. Elles existent pourtant. Tel habitué des Cercles les plus choisis est, comme un Portille ou un Longuillon, une âme de boue, et qui mériterait la terrible épigramme de Rivarol, parlant d’un capitaine des gardes, traître au roi dans la nuit du 5 octobre : « Lassé d’un trop long déguisement, ce grand seigneur, » dit le pamphlétaire, « revêtit enfin, pour fuir, l’habit de son laquais. » Tel autre, au contraire, et c’était le cas de San Giobbe, a dépensé sa jeunesse en puérils triomphes de sport, qui avait en lui et qui a gardé jusqu’à la fin une âme de noblesse et de chevalerie. Le gentilhomme de Bergame, venu à Paris par désœuvrement, et aussi pour l’enfantin motif de « boutonner » les premiers tireurs des premières salles s’était retrouvé, dans son attachement pour la jolie Madeleine Nortier, le romanesque et passionné cavalier servant de son pays, un parfait représentant de cette sorte d’amoureux, pour qui un engagement de cœur devient l’affaire unique de la vie. Peu parleur, ne s’étant même pas laissé effleurer par l’ironie française, totalement dépourvu de vanité, mais apportant à