Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/188

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Miss Cobay avait la peau trop blanche et trop rose, un trop évident frémissement de son être nerveux ; elle était trop haute de taille avec des épaules trop minces pour son âge. Mais quelle vitalité dans l’opulente toison de ses cheveux fauves, tordus sur sa nuque en un chignon énorme ; quelle délicatesse dans ses traits, quelle grâce fière à chacun de ses gestes ! Si j’avais observé au lieu d’imaginer, — c’est mon éternelle faute, — j’aurais constaté qu’elle enveloppait le jeune ami de Mme de Saint-Cygne d’une attention passionnée, et que, de son côté, le général ne perdait pas de vue un des mouvements de ladite Blanche. A distance, ces deux figures se détachent pour moi, sur la muraille peinte de la salle à manger, avec des rehauts inoubliables, le père en smoking et en cravate blanche, la fille dans une de ces robes hardies, comme les Anglaises en osent seules, en crépon de soie des Indes, dont le vert d’eau clair avivait encore l’éclat de son teint et de ses cheveux. L’hallucination rétrospective me montre aussi les divers convives des autres petites tables et ceux de la grande que présidait la Balbi, quoique sur place je n’y eusse pas prêté