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ou bien à l’arrière-salle du café Tabourey, le lieu de ralliement, aujourd’hui disparu, des débutants de lettres en ces années lointaines. Ces sautes subites de milieu me procuraient des délices de mystère bien enfantines, car dix mois s’étaient passés à peine que je renonçais définitivement à l’érudition pour suivre mes goûts, comme j’aurais dû faire aussitôt en toute franchise. Pourtant je ne regrette pas ces longues séances d’assiduité aux conférences de la petite salle située sous les combles de la Sorbonne, car c’est là que j’ai connu le plus original, le plus charmant et aussi - étrange ironie du sort - le plus romanesque des amis que j’aie eus dans cette période trouble de ma jeunesse. Cette originalité même et ce romanesque, unis chez cet incomparable garçon à un si assidu et si modeste effort de savant (il étudiait la grammaire comparée), auraient dû m’avertir, dès lors, que les sources profondes de la vie de l’âme coulent d’autant plus riches et plus chaudes que les habitudes sont plus réglées et l’ambition plus humble. Je crois bien que je percevais vaguement cette supériorité sentimentale du peu littéraire Charles Durand, — ainsi