Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/310

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C’était là sinon l’excuse, au moins l’atténuation du crime que Bérion avait commis envers cette amitié, qu’il y eût été invité, provoqué, entraîné par Jeanne. Que de fois Michel avait entrevu cette vérité, évidente pour qui connaissait comme lui ces deux êtres ! Cette évidence, il n’avait jamais voulu l’accepter ; mais, le long de ce mur de cimetière, remué jusqu’au fond par cette idée que son ancien ami reposait pour toujours à quelques pas, voici que tous deux, cette femme et cet ancien ami, se représentaient à lui dans cette réalité profonde de leur nature qui donnait si bien le mot de l’affreuse énigme ! Elle lui apparaissait, elle, avec son joli visage de blonde sensuelle et curieuse, avec ses yeux un peu glauques où, par moments, passait comme une cruauté ; avec ce je ne sais quoi de dangereux et de caressant, de félin et d’enveloppant qui était en elle. Même à l’époque où il l’aimait avec la foi la plus aveugle, Michel avait souffert de ce qu’il devinait, dans cette séduisante et souple enfant, d’indiscernable et de redoutable. Elle ne lui avait jamais été claire et transparente. Il l’avait toujours sentie prête à lui couler