Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/53

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vous confie mon vieil ami San Giobbe. Ne le laissez pas marcher trop vite… » Puis, après une dizaine de pas : « Pourquoi étais-tu si rouge tout à l’heure, mon enfant ?… De quoi aviez-vous donc parlé, Gabriel et toi ?… » — « Ah ! maman ! » fit-elle en rougissant de nouveau, et un frémissement passa sur ses lèvres fraîches : « Je crois qu’il va vous demander ma main. » — « Et que faudrait-il répondre, mademoiselle ?… " — « Si c’est oui, je serai bien heureuse… » répondit-elle, et elle ajouta tout bas : « Si vous saviez comme je l’aime !… » Tandis qu’elle prononçait ces mots, où s’épanchaient enfin les secrètes tendresses contenues depuis tant de jours, celui dont elle tenait, à son insu, et ses beaux yeux noirs, et sa pâleur ambrée, et sa sensibilité passionnée, — mais pure chez elle et coupable chez lui, — épiait d’un regard avide le signe promis par la mère. Quand il vit que celle-ci commençait de déganter sa main gauche, son émotion fut si vive qu’il dut s’arrêter de marcher, et, comme son c