Page:Bousquet - Iris et petite fumée, 1939.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
21


qui font bien, reproduites sur papier couché, dans un ouvrage de médecine. Ce n’était pas un homme qu’on voyait, mais que ses gestes vous montraient, l’enveloppant d’un faux-jour, où je l’aurais pris, tout le premier, pour le mauvais rêve de ses paroles. Je pouvais me tromper sur lui, au moins aura-t-il été dépouillé par mes yeux de tout ce qui n’était pas moi, ses traits formaient le dedans de sa pâleur et de l’effroi qu’elle m’inspirait : « Mais qu’allez-vous donc faire ? » avais-je crié. Il s’était levé en pivotant sur un pied, se dirigeait de biais vers une vierge gothique qu’il enveloppa soudain d’un long geste de tendresse. On dirait qu’il préfère ne me déclarer que de loin qu’Iris est vivante : « Vous ne comprenez pas, a-t-il dit sur le même ton que s’il avait répété le propos d’un souffleur invisible, il y a une femme qui a chassé le jour de sa maison dans la personne d’un homme ?
« Et je suis cet homme, je suis cette maison et je suis aussi cette femme. Quand je pense qu’il n’y a que moi pour le savoir, je m’agenouille dans le vent qui me déshabille. Au plus profond de ma pensée alors, ma solitude n’est plus moi, mais le silence d’une autre, le règne de sa nudité comme un désert de transparence partout où mon cœur m’attendait. C’est une fée peut-être. Une nuit assez profonde pour ensevelir le monde berce son loisir