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Page:Boussenard - La Terreur en Macédoine, Tallandier, 1912.djvu/134

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la terreur en macédoine

— Qu’Allah te soit propice ! »

Ces quelques mots se heurtent, se froissent comme des épées. D’instinct ces deux hommes qui ne se sont jamais vus se haïssent et pressentent, l’un dans l’autre, l’ennemi.

Du reste, contrairement à la coutume hospitalière des Turcs, le vali n’offre point les cigarettes et le café traditionnels. Il ne fait pas asseoir Marko sur le divan, près de lui. Il le tient debout, comme un subalterne devant son supérieur, et un supérieur dont l’autorité est appuyée par dix mille baïonnettes.

Puis il ajoute sans préambule :

« Tu as reçu mon ordre, puisque tu as pris soin de m’en informer… Pourquoi as-tu tardé si longtemps à obéir ?

— Pourquoi as-tu fait accompagner cette convocation par cent hommes de troupe ?

— Réponds-moi autrement que par une question, sinon je te traite comme un rebelle et je te fais passer par les armes.

— Rebelle !… mais je le suis… Quant à me faire fusiller, tu ne l’oserais pas… »

En homme sûr de sa puissance, le Turc se met à rire et ajoute :

« Mots inutiles… fanfaronnades ridicules… Je représente ici le sultan que Dieu garde… réponds-moi comme au maître !

— Je te le répète, je suis un rebelle, puisque j’ai anéanti jusqu’au dernier les gendarmes chargés de m’arrêter !

— Toi !… c’est toi !…

— Moi-même !… j’ai fait répandre le bruit que c’étaient les paysans révoltés, parce que cela me plai-