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la terreur en macédoine

L’enfant roule sur des charbons ardents, pendant que la mère exhale une clameur déchirante, en agitant ses deux moignons rouges !

De tous côtés retentit le cri hurlé par les sopadjis, les zaptiés et les sacripants du colonel Ali :

« Joannès !… où est Joannès ?… »

Ce nom du chef aimé, ce nom libérateur est devenu symbole d’égorgement, formule de massacre, de mutilation et d’incendie.

Méthodique, implacable, furieuse, la tuerie continue.

À son tour le colonel reconnaît le pacha. Il s’avance vers lui et, le sabre pendu à la dragonne, lève les bras en criant :

« Rien ! maître… toujours rien !… ce maudit est introuvable !

— Continue toujours, Ali !… et vous, mes braves, pas de merci.

« Qu’il ne reste pas un mur debout ! »

L’ordre abominable n’est que trop bien exécuté. Bientôt le village n’est plus qu’un monceau de décombres, un charnier humain.

Marko, perplexe, réfléchit et se demande ce qu’il va faire. Cette sauvage répression ne peut satisfaire son aveugle férocité. Une humble bourgade !… cinq cents habitants !… qu’est-ce que cela ?… une goutte de sang, au lieu du fleuve rouge au milieu duquel il aimerait à se vautrer.

Il faut en ravager vingt-cinq… cinquante… et plus ! mettre tout à feu et à sang !… anéantir, avec le dernier chrétien, l’ultime ferment de révolte.

À ce moment des cris furieux retentissent. Des gendarmes amènent un homme en lambeaux qui hurle, se débat et veut parler au chef.