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la terreur en macédoine

cile ! hurle Joannès enthousiasmé. Les douze apôtres… l’effroi du pays, ne sont plus que neuf !… Armez-vous !… mes frères, armez-vous, en avant ! et mort aux Albanais ! »

Il jette sa carabine vide. Michel la rattrape au vol et lui passe celle de l’homme décapité.

Cinq ou six canons bronzés s’allongent, en faisceau, par l’ouverture, prêts à cracher les balles. Joannès, aussi avisé que brave, sent qu’il va être canardé. Il s’écrie :

« Ouvre l’œil, Michel, et fais comme moi.

— Ça va bien ! » dit Michel, un gros père tranquille trapu et solide, qui pour ses débuts est superbe.

D’un bond, Joannès se jette derrière le corps d’un cheval, s’aplatit, se tasse, arrive à se rendre invisible et attend. Michel s’abrite comme lui, fouille les cartouchières et lui passe les munitions. Brusquement, les autres s’enhardissent. La contagion de cette intrépidité les gagne. Et puis, ils finissent par comprendre que cette passivité de bêtes à l’abattoir sera leur perte irrémédiable. L’un d’eux résume brièvement leur pensée :

« Puisque nous sommes condamnés… puisque rien ne peut plus nous sauver… mourir pour mourir… eh bien ! mieux vaut périr en luttant »

Un autre ajoute, rageant à froid :

« Ah ! pourquoi avons-nous attendu si longtemps !… »

Et tous crient à pleine poitrine :

« Vive Joannès !… et en avant !… à mort les brigands !… à mort !…

C’est une véritable clameur de vengeance, au sou-