Page:Boutroux - Études d’histoire de la philosophie.djvu/226

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s’agissait de savoir comment Dieu pouvait naître en ce qui n’est pas lui, Boehme se demande comment Dieu peut renaître en ce qui violemment s’est séparé de lui. Or il estime qu’il pourra résoudre ce problème s’il peut découvrir, et la source de l’existence divine, et l’origine du monde et du péché. Et cette science sera la régénération même. Car, lorsqu’elle pénètre jusqu’aux sources, la connaissance se confond avec l’action et la réalité. Voir les choses du point de vue de Dieu, c’est renaître à la vie divine.

Telle sera donc la division fondamentale du système de Boehme : 1° Comment Dieu s’engendre-t-il lui-même ? 2° Pourquoi et comment Dieu a-t-il créé le monde, et comment le mal s’y est-il introduit ? 3° Comment Dieu peut-il renaître au sein de la créature corrompue, et quelles sont les fins dernières des êtres ?

C’est, on le voit, la question de l’origine et de la fin, posée dans toute sa généralité et dominant toutes les autres. Tandis que les anciens cherchaient a posteriori quels principes stables et déterminés se cachent sous le mouvement et l’indétermination des phénomènes, et ne connaissaient pas de milieu entre un absolu indéterminé tout illusoire, tel que le hasard, et un absolu plein et achevé, tel que l’intelligence, notre philosophe, pour qui toute nature est le résultat d’une action, cherche comment s’est fait l’absolu lui-même, en tant qu’il est ceci et non cela ; il descend, à propos de Dieu même, de la puissance infinie à la production de l’être déterminé.