Page:Boutroux - Pascal.djvu/84

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effet, qui, dit-il, lui interdit les austérités de la vie dévote. De plus, quoiqu’il sente bien qu’il lui faut un directeur, il élève des difficultés, quand il s’agit de le choisir : un reste d’esprit d’indépendance proteste en lui. Il n’est pas encore entièrement conquis à Dieu, et il semble que quelque mouvement intérieur, d’une autre nature que ceux qu’il a éprouvés jusqu’ici, soit nécessaire pour accomplir véritablement sa conversion.

Tandis qu’il était encore dans cet état d’incertitude, il arriva que, pendant une visite qu’il faisait à sa sœur à Port-Royal-des-Champs, le sermon vint à sonner. C’était, vraisemblablement, comme l’a vu M. Délègue, le jour de la Présentation de Notre-Dame, 21 novembre. Jacqueline quitta son frère et lui, de son côté, entra dans l’église pour entendre le sermon. Il trouva le prédicateur en chaire ; c’était M. Singlin. Le sermon, analogue à ceux qui étaient prêchés d’ordinaire au jour de la Présentation, où l’on fête la consécration de la Vierge au Seigneur, roula sur le commencement de la vie des chrétiens, et sur l’importance qu’il y avait à ne point s’engager au hasard, comme font les gens du monde, par l’habitude, par la coutume, et par des raisons de bienséance tout humaines, dans des charges et dans des mariages. Le prédicateur exposa comment il fallait consulter Dieu avant d’entrer dans ces conditions, et bien examiner si l’on y pourrait faire son salut sans empêchements. En entendant ces paroles, Pascal fut surpris du rapport qu’elles avaient à sa situation. Il lui sembla que, par une conduite spéciale de la Providence, tout cela avait été dit exprès