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Page:Bouvier - Les Mystères du confessionnal, 1875.djvu/149

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des filles ou des femmes de leur paroisse ? Est-il vrai qu’ils interdisent a divinis, qu’ils enlèvent l’autorisation de confesser ou même de vêtir l’habit ecclésiastique à des prêtres ivrognes et libertins, objet de scandale pour les fidèles ?

Est-il vrai que ces condamnations et interdictions sont fréquentes et non pas rares ; qu’elles atteignent non quelques sujets, mais un nombre considérable de prêtres, à ce point que — dans la seule ville de Paris — on compte quatre mille prêtres interdits ou ayant jeté la soutane aux orties, et plus de deux mille moines défroqués ?

Est-il vrai que la statistique judiciaire ait constaté pour la France seulement et par année, pour la période écoulée depuis 1830 jusqu’à nos jours, douze cents condamnations infligées à des curés, ou à des Jésuites, ou à des frères de la doctrine chrétienne, pour viols, outrages aux mœurs, attentats à la pudeur commis sur de jeunes enfants, filles et garçons, confiés à leurs soins, ou sur des femmes et des filles, leurs pénitentes ?

Si toutes ces choses sont réelles, constatées, indéniables ; si toutes ces abominations ont eu lieu, si les preuves à l’appui ont été fournies ; si les décisions des évêques les confirment ; si tant de prêtres, de Jésuites, de moines, de religieux de toute robe ont encouru et mérité les flétrissures du pouvoir séculier et les censures de leurs supérieurs ecclésiastiques, que doit-on en conclure ?

Voici les réponses que fournit une logique inflexible à de telles questions :

Les prêtres qui se sont rendus coupables de si grands crimes ou dont la conduite a mérité de tels châtiments n’ont pas plus respecté le sceau de la confession qu’ils n’ont gardé la continence, qu’ils n’ont suivi le précepte de sobriété. Le curé ou le moine qui abuse d’une fille ou d’une femme dans l’église ne s’arrêtera pas devant la violation du sceau pénitentiel. Le prêtre qui s’enivre en société avec d’autres ecclésiastiques n’a pas plus de mesure dans ses paroles que dans ses actes, il dévoilera les secrets de ses pénitentes. In vino veritas ; la vérité dans le vin ; c’est pour les confesseurs ivrognes que le proverbe a été fait.

Poursuivons le raisonnement et voyons ce qui doit se produire dans la pratique, eu égard à l’état actuel de démoralisation du clergé.

On doit étendre la probabilité de la violation du sceau pénitentiel à tous les prêtres condamnés par la justice séculière, à ceux qui sont frappés par l’autorité ecclésiastique, et à ceux qui — ayant pu échapper aux condamnations et à l’interdit — s’écartent de la loi de continence. Or, ceux-là sont dans une proportion telle que le pape Pie IX a dû déclarer que, dans le clergé romain, un seul prêtre sur cent gardait le vœu de célibat. Les clergés des autres pays ne sont ni plus saints ni plus fidèles observateurs de la loi de l’Église que le clergé de Rome ; et nous pouvons affirmer qu’en France, en Espagne, en Belgique et ailleurs, d’après le pontife, il n’y a pas un prêtre sur cent qui s’abstienne de l’œuvre de chair et qui garde le sceau de la confession.