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Page:Bouvier - Les Mystères du confessionnal, 1875.djvu/75

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vriers. Je les blâmerais, mais je leur donnerais l’absolution à Pâques. J’en ferais de même pour les musiciens, et, à plus forte raison pour ceux qui, sans un danger particulier, dansent dans ces occasions.

6o Bien plus, je ne voudrais pas refuser rigoureusement l’absolution à tous ceux qui dansent quelquefois, dans les réunions publiques — vulgairement assemblées ; — les confesseurs peuvent avoir certaines raisons d’excuser, sinon de tout péché, au moins d’un si grand, c’est-à-dire mortel : c’est le cas d’un jeune homme qui se ferait tourner en ridicule par ses camarades, et d’une jeune fille qui s’attirerait le mépris de celui qui la recherche en mariage, s’ils refusaient de danser. Mais, au contraire, je n’admettrais pas d’excuse pour les musiciens qui font profession de jouer dans les réunions, car, sans des raisons suffisantes, ils sont pour beaucoup de personnes une occasion de péché.

7o Je ne pense pas qu’on puisse absoudre, même à Pâques, ceux qui s’obstinent à fréquenter nuit et jour les bals publics, car ils s’exposent à un danger manifeste, et l’expérience prouve qu’ils sont presque tous corrompus.

Il n’est pas hors de propos de rapporter textuellement la décision que le sage et savant Tronson, consulté au sujet des bals par un Évêque, rendit, le 29 mai 1684, relativement aux jeunes filles qui s’obstinent à danser. Elle est conçue en ces termes :

1o Les confesseurs doivent détourner, autant qu’ils le peuvent, leurs pénitentes de la danse, surtout s’il s’y trouve des garçons. 2o Ils doivent leur refuser l’absolution, si la danse est pour elles une occasion de péché, soit par mauvaises pensées ou autrement, et qu’elles ne veuillent pas promettre de s’en abstenir. 3o Si elle n’est pas pour elles une occasion de péché, et s’il ne s’y passe rien de scandaleux, j’aurais peine à condamner les confesseurs qui leur donneraient l’absolution, supposé que l’évêque ne l’ait pas défendu. 4o Comme très souvent il y a du péril dans la danse, et qu’il arrive souvent que celles mêmes à qui elle n’est pas une occasion de péché, s’y attachent trop, les confesseurs peuvent leur donner pour pénitence de s’en abstenir pour plus ou moins de temps, selon qu’ils les trouvent disposées, et qu’ils jugent que cela leur est nécessaire, et leur refuser l’absolution si elles ne veulent pas le promettre.

Je crois que la prudence est bien nécessaire dans ces occasions.

Le pieux docteur dit encore, au même évêque, que lorsqu’il rencontrait des difficultés de ce genre, il avait l’habitude de suivre le conseil que St Augustin, Épît. 22, t. 2, p. 28, donnait à l’évêque Aurélius, tout en déplorant l’usage établi en Afrique, sous un prétexte religieux, lequel consistait à se livrer, dans les cimetières, aux excès du manger et du boire, en l’honneur des Martyrs : Ce n’est pas, autant que je puisse en juger, par la sévérité et la dureté, pas même par des moyens impérieux, qu’on peut mettre un terme à ces choses-là ; c’est plutôt en instruisant qu’en ordonnant, plutôt par les conseils que par les menaces. C’est ainsi, en effet, qu’on doit en agir avec le grand nombre et ce n’est qu’avec un petit nombre de pécheurs qu’il faut employer la sévérité.

Cajétan et Azor enseignaient que les bals ne sont pas défendus les dimanches et jours de fêtes, non-seulement parce qu’ils sont un signe de joie, mais encore parce que, ayant lieu en public, ils n’entraînent pas un grand danger de mal ; en outre parce qu’ils sont l’occasion de propositions de mariage ; et encore parce que, privés de cette distraction, les habitants de la campagne courraient un plus grand danger en se livrant à l’oisiveté, aux entretiens en tête à tête, où à de mauvais projets.

Sylvius, cependant, juge plus sainement, t. 3, p. 801, qu’on ne doit pas interdire les bals aux habitants des campagnes comme s’ils devaient pécher mortellement par cela même qu’ils danseraient ; qu’on doit cependant les en éloigner par de bons avis et par la persuasion, car il se commet souvent