Page:Bouyer - Claude Lorrain, Laurens.djvu/15

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nature dont il interprète la lumière et balance les contours, il s’évade de la nuit des temps, il sort de l’ombre et laisse harmonieusement une trace lumineuse dont un reflet s’est perpétué jusqu’à nous.

Grouper les quelques faits qui permettent d’entrevoir sa vie sous son œuvre, analyser l’aurore de la flamme divine en disposant l’amoureux d’art à deviner l’homme et l’artiste, telle est la double et redoutable mission de ce petit livre, écrit à la clarté d’un génie français qui, selon l’heureuse expression du meilleur de ses biographes, alluma pour la première fois le soleil dans le ciel de l’art.


II

sandrart et baldinucci

Les deux maîtres français du xviie siècle ont trouvé chacun deux biographes qui purent les approcher dans leur séjour en Italie : pour le Normand Nicolas Poussin, c’est Félibien et Bellori, deux sources contemporaines où tout le monde, ensuite, a puisé : pour le Lorrain Claude Gellée, c’est Sandrart et Baldinucci, qui nous disent tout — ou plutôt le peu que nous savons de sa personne sans faste et de sa vie sans aventures. En désaccord sur de grands points, ils se complètent souvent : très différents, toutefois, de caractère et de situation, nos deux biographes n’inspirent pas une confiance égale. À première vue, l’Allemand Sandrart, en homme du Nord, paraît enclin à dire la vérité