Page:Bove - Mes Amis.djvu/68

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cessé de grandir, s’évanouit. L’intérêt que Billard me portait était une réalité, alors que mes réflexions n’étaient que des divagations de malheureux.

Je le regardai avec reconnaissance.

— Oui, je suis triste.

J’attendais des plaintes, des confidences. Je fus déçu : il me conseilla de réagir.

Nous nous arrêtâmes devant un restaurant. La peinture de la devanture se décollait. Sur une glace les passants lisaient cette phrase : On peut apporter son manger.

— Entre, me dit Billard.

Je baissai un bec de cane dont la chaînette tremblait. Des gens se retournèrent.

Je restai sur le seuil de la porte.

— Entre donc !

— Non, vous le premier.

Il passa devant. À cet instant, je remarquai que c’était moi qui avais ouvert et fermé la porte.

De longues tables et quelques-uns de ces bancs de réfectoire qui se lèvent à un bout quand on s’assoit, meublaient la salle. La fumée de tabac faisait des spirales, comme du sirop dans un verre d’eau. La trappe de la cave trembla sous nos pas. Devant chaque