Page:Bove - Mes Amis.djvu/75

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On se leva. Je me vis dans une glace jusqu’aux épaules ; j’avais l’air d’être en cour d’assises. Quoique je fusse pris de boisson, je me reconnus. Cependant, le contour de mon buste était flou comme l’ombre trop allongée de quelqu’un.

Je traversai la salle, suivi de Billard.

Dehors, un vent brutal me fouetta la figure, comme à la portière d’un wagon. Une seconde, j’eus l’intention d’accompagner mon camarade, mais je me retins : à quoi cela eût-il servi ? Et puis, on ne s’entendait pas. Il était aimé, riche, heureux.

D’ailleurs, neuf heures sonnaient.

Je n’aurais osé dire au revoir le premier ; Billard était moins délicat.

— À demain, Bâton.

— Oui, à demain.

J’allai droit devant moi jusqu’à ce que je rencontrasse une rue familière.

Les bars étaient pleins, chauds et éclairés.

Bien que je n’eusse pas soif, l’envie de prendre quelque chose me harcelait. Je résistai, jusqu’à ce qu’il m’advint de songer que je n’avais rien dépensé d’inutile.

J’entrai dans un Biard.

Une vapeur de salle de bain flottait autour