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VEUVAGE BLANC

croit n’être pas plus bête qu’une autre, voire que ces messieurs qui mettent du noir sur du blanc.

« Au surplus, je prêche un converti. C’est dommage, Claude, que tu ne sois pas resté soldat…

« Pour finir un récit qui s’allonge, après la bénédiction nuptiale, beaucoup plus brève — bien que, n’ayant jamais vu trois généraux ensemble, notre excellent curé n’ait pu se tenir d’y aller aussi de son allocution — on s’en est allé déjeuner à la Saulaie. Maman a pensé faire une maladie de cette dérogation à la coutume. Car enfin, soutenait-elle, « je représente la mère de la mariée ». À quoi il a répondu : « Et moi, chère madame, je suis son père », d’un ton si impératif, tout en étant bonhomme, que la question s’est trouvée résolue.

« Louise était délicieuse en robe de laine blanche toute simplette, mais allant à merveille, petit chapeau de tulle garni de clématite, avec un rien de fleur d’oranger, et voilette en point de Bruges. Encore une singularité qui a fait faire à maman ses grands bras. Mais cela, c’était l’idée de Louise — tu penses bien que le général n’avait pas mis le nez dans la question chiffons — et elle aussi a sa tête.

« Ils vont rester tranquillement chez eux jusqu’à la Toussaint, époque à laquelle ils iront prendre possession de leur commandement. Il est à peu près sûr d’obtenir la division de Reims. Ce sera le rêve, n’étant qu’à deux heures de Laon et ainsi pourra-t-on voisiner aisément. Mme Thierry — j’écris cela pour m’y habituer — m’a déjà engagée d’ailleurs à passer quelque temps auprès d’elle quand ils seront installés. La grande vie, mon cher… Grâce à Dieu, mon genre de beauté n’est pas de ceux qui inspirent des pensées d’enlèvement, car, au sein des camps — style noble — à quels périls ne m’exposeraient point m«s inclinations panachardes… La marâtre nature y