Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/156

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il contient ne leur convienne pas, il est condamné, & les exemplaires sont supprimés. S’il traite de politique, il faut encore qu’il soit plus réservé : cela regarde le ministere. L’histoire même ne peut être écrite avec la liberté qu’elle demande. Il est dangereux que les vivans n’embrassent le parti des morts. Un auteur est obligé de pallier bien des faits qui se sont passés dans les regnes précédens, par l’intérêt qu’y prennent des familles puissantes, & des corps nombreux & accrédités.

Un historien qui voudroit écrire fidélement ce qui est arrivé depuis Henri III, jusqu’aujourd’hui, seroit obligé d’opter entre le plaisir de dire la vérité, & la douleur de se bannir de sa patrie. Il faudroit qu’il cherchât dans les pays étrangers un asyle contre la persécution, qu’il s’attireroit.

Certains moines [1] ne lui pardonneroient jamais le fidéle récit du meurtre de Henri III [2]. D’autres [3] emploieroient leur crédit pour venger l’exacte description qu’il feroit du crime de leur pere Guignard [4].

Et tous enfin se réuniroient ensemble,

  1. Les jacobins.
  2. Ce crime énorme fut commis par Jacques Clément, moine jacobin.
  3. Les jésuites.
  4. Jésuite qui fut pendu, pour avoir trempé dans un assassinat commis contre Henri IV, par Jean Châtel, jeune écolier que ses régens avoient séduit.