Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/158

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la vérité, & perdit les faveurs & les récompenses que lui avoient attirées ses mensonges [1].

La défense des livres est cependant un fort mauvais moyen pour les supprimer. Dès qu’on interdit la lecture d’un livre tout le monde s’empresse à l’acheter. Le libraire en augmente le prix : il se vend beaucoup plus qu’il ne se vendoit auparavant & tel ouvrage auroit été imprimé dix fois dont on n’auroit pas vendu deux cents exemplaires, si l’envie & la curiosité du public n’avoient point été excitées par les défenses des magistrats & des pontifes.

Ce qui accrédite encore ces livres prohibés, c’est qu’ils sont ordinairement bons & instructifs, & qu’ils intéressent les gens d’esprit & les savans : au lieu que la plupart de ceux qu’on débite publiquement ne sont que des romans & des historiettes, propres à divertir quelques femmelettes & quelques abbés ; un homme de génie aimant mieux garder le silence que d’écrire contre ses sentimens.

Je t’ai déja parlé de quelques savans de ce pays : j’en connois plusieurs autres. Un d’entr’eux [2] vient de donner un ouvrage de politique.

Quoiqu’il ait beaucoup de feu, d’esprit &

  1. Le pape avoit écrit une lettre à Maimbourg, pour le féliciter sur son Histoire du schisme des Grecs.
  2. L’abbé de S. Pierre.