Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/184

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je ne t’aurois jamais connu, puisque je ne le pouvois par la voie des sens [1].

Après avoir posé pour principe l’idée innée de la divinité ; il la prouve par les mêmes raisons que les philosophes Cartésiens employoient pour démontrer que les notions de l’être & de la pensée ne peuvent venir par les sens.

Si j’interroge mes yeux, continue-t-il, ils m’apprennent que, puisque tu n’es pas coloré, ce n’est point par eux que tu es entré dans mon esprit. Mes oreilles me disent, que n’étant point sonore, ce n’est pas par elles. Mon nez n’a point de part à ton idée, qui ne peut avoir d’odeur. Ma bouche de même, ton idée ne pouvant être goûtée. Et tous mes sens m’annoncent que, puisque tu n’es point corporel, ils n’ont pû me donner aucune notion de toi… Je connois à présent que cette notion étoit gravée dans mon ame, &c. [2].

  1. Ego erravi sicut ovis, quae perierat, quaerens te exterius qui es interius ; & multum laboravi, quaerens te extra me, & tu habitas in me…… Misi nuncios meos omnes sensus exteriores, ut quaererent te, & non inveni : quia malé quaerebam foris, quod erat intus. Video enim, lux mea Deus,qui illuminasti me, qui malé te per illas quaerebam, quia tu es intus, & tamen ipsi ubi intraveris nescierunt. August. Soliloq. cap. 31. n. 1.
  2. Nam oculi dicunt, si coloratus non fuit, per nos non intravit. Aures dicunt, si sonitum non facit, per nos non transivit. Nasus dicit, si non oluit, per me non venit. Gustus dicit, si non sapuit, nec per me introivit. Tactus etiam addit, si corpulentus non est, nihil me de hac re interroges… Absit ut ista crederim Deum meum, quae etiam à brutalium sensibus comprehenduntur… Augustinus, ibid. num. 2.