Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/195

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la raison sous le poids d’ornements froids & puériles.

Cette façon vicieuse d’écrire d’Augustin a gâté & rendu ridicules les ouvrages d’un nombre d’anciens docteurs nazaréens, qui l’ont voulu imiter. Ils ont pris son style : mais ils n’ont pu acquérir son génie, & sont restés infiniment au-dessous de leur modéle, n’en ayant pris que le mauvais. Les théologiens du X. du XI. & du XII. siécles ont donné dans les antitheses ridicules. Leurs écrits ne sont remplis que de sophismes exprimés en termes pompeux. Anselme, archevêque de Cantorbéry, qui vécut dans le XI. siecle, pour prouver la nécessité de l’accomplissement d’un mystere du nazaréisme, fait un discours très-long, dans lequel il ne dit rien de ce qu’il devoit dire. Après s’être proposé une difficulté, il ne la résout que par un jeu de mots. Quelque nécessité, dit-il, exigeoit-elle que la Divinité se revêtit d’un corps humain pour sauver les hommes ? L’Etre tout-puissant n’a qu’à vouloir une chose, & l’effet suit toujours sa volonté. Les hommes pouvoient donc être sauvés dès qu’il l’eût jugé à propos. Par conséquent l’incarnation étoit inutile. Mais non, elle ne l’étoit point, parce qu’elle n’a été opérée que par la volonté de Dieu,