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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/233

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morts il y a déja quelque tems, m’ont paru fort justes. Tu as lu une partie de leurs ouvrages. Ainsi il te sera aisé d’en juger par toi-même. Dès que tu auras vu les livres nouveaux, apprends-moi tes sentimens.

J’ai réfléchi plusieurs fois sur ce grand nombre d’hommes illustres qui vivent dans certains regnes ; & sur la petite quantité qu’il en paroît dans certains autres. Seroit-ce que la nature s’épuise, & qu’il faut des siecles pour préparer une matiere qui puisse former la tête de Descartes ou celle de Newton ? Les ames seroient-elles de différentes qualités ?

On ne peut, sans absurdité, soutenir de semblables theses. Cette question se réduiroit à savoir, si les arbres sont plus gros dans certains siecles, que dans certains autres. La nature n’agit pas différemment dans ses opérations. Comment a-t-elle donc oublié, pendant deux mille ans, la façon dont elle avoit formé les cerveaux de Sophocle & d’Euripide, & n’a-t-elle semblé s’en ressouvenir qu’en constituant ceux de deux fameux poëtes François ? [1]

Pour éclaircir le défaut & le manque

  1. Corneille et Racine.