Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/261

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d’un homme qui se nourrit de la lecture des bons livres, & qu’un maître habile forme de ses mains, n’a pas besoin pour l’épurer de rester tous les matins six heures dans l’antichambre d’un ministre, d’aller l’après-dîné étaler sa figure aux Tuileries, & de faire le fat le soir dans le chauffoir de la comédie. Pour mettre cette these en évidence, il faut avoir recours à l’expérience.

« Parmi les génies supérieurs, & les grands hommes qu’a produit le siecle de Louis XIV, non-seulement dans les sciences, mais même dans l’art de la guerre, à peine la postérité se souviendra-t-elle du nom de cinq ou six de ceux, qui nés dans un rang éminent, n’ont dû leur grandeur qu’à leur naissance. Elle lira avec étonnement les actions du grand Condé, & s’instruira avec soin de celles du Vicomte de Turenne. Elle proposera pour modele des généraux le duc de Vendôme. Mais opposons à ce petit nombre qui passera à l’immortalité, cette foule de grands hommes qui se sont élevés par leur seul mérite, Catinat, Vauban, Laubanie, Louvois, Colbert, le maréchal de Villars enfin, aussi utile à la France, que le vainqueur d’Annibal le fut à sa patrie.