Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/278

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qu’un simple particulier. Ils parlent à ceux de leurs sujets qu’ils aiment. Comme ils savent qu’ils sont infiniment au-dessus de tout ce qui respire dans le royaume, ils dédaignent la ridicule vanité de vouloir affecter un cérémonial qui les gêneroit, & qui n’augmenteroit point leur autorité. Elle est beaucoup plus étendue que celle des sultans, quoiqu’elle soit moins visible. Elle ne craint point de recevoir les atteintes auxquelles est exposé le pouvoir despotique du grand-seigneur.

On n’a jamais vu dans ce pays-ci la majesté du trône souillée par des affronts faits à la personne des souverains. Quelque révolte qu’il y eût dans le royaume, on a toujours respecté le prince [1] ; & ceux mêmes qui portoient les armes contre lui, affectoient de publier qu’ils n’en vouloient ni à sa personne, ni à son autorité.

Ils couvroient leurs crimes du prétexte de défendre la religion ou de se garantir des vexations des ministres. A Constantinople, les janissaires,

  1. Cela a besoin d’explication : car le moine Jacobin qui assassina Henri III, le jésuite Guignard, Jean Chastel & Ravaillac qui conspirerent contre la vie de Henri IV, n’ont guere respecté la personne des souverains. Il faut donc supposer qu’Aaron Monceca n’entend parler que des chefs de différens partis.