Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/293

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qui l’avoient autrefois saccagée.

Les colonnes Trajane & Antonine sont les plus belles choses qu’ont épargné les malheurs arrivés à cette capitale du monde. On a placé sur toutes les deux la statue des deux principaux docteurs nazaréens. Les pontifes prétendent être leurs successeurs en droite ligne, & tenir d’eux leur infaillibilité. Mais ce qu’il y a de particulier, c’est que l’un de ces deux docteurs reprit l’autre, & qu’ils ne crurent jamais eux-mêmes être infaillibles, ayant expressément expliqué dans leurs écrits, que c’étoit Dieu seul à qui ce droit étoit réservé, & non à l’homme, qui n’est rien auprès de lui, dans quelque état relevé qu’il soit.

La sûreté & la justesse des décisions pontificales sont dans ce pays les articles les plus essentiels de la croyance des nazaréens. L’inquisition est attentive à assurer les maximes de ce dogme ; lorsqu’elle a fait arrêter quelqu’un qui a osé soutenir le contraire, il est rare qu’elle se laisse fléchir, & ne le punisse de mort. Il seroit beaucoup moins dangereux à Rome d’offenser Dieu que le pontife. Un homme qui fait un péché mortel en est quitte en donnant un ou deux testons pour brûler de la cire en l’honneur de S.