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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/344

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au dernier supplice, conduits sur un échaffaut faire de longs discours, débiter un long tissu de sentences morales. La chose est fort commune en Angleterre, où il est peu de pendus qui ne haranguent tant soit peu le peuple. Mais où trouve-t-on des génies assez forts pour vaincre dans les derniers momens les préjugés, & soutenir, ainsi qu’Osman, son ame dans cette égalité de sentiments ?

Je t’avouerai, mon cher Monceca, que quelque philosophe que je sois, je ne voudrois pas mourir hors du Judaïsme. Je sens que je ne résisterois pas aux premieres idées que j’ai reçues dans l’enfance ; & que j’ai cultivées depuis.

Je sais qu’Osman est peu persuadé du nazaréisme. C’est un reproche qu’on lui faisoit lors même qu’il professoit cette loi. Il n’est pas à coup sûr, plus touché du mahométisme. Mais enfin dans cette incertitude de religion, s’il fait tant que de croire qu’il doive y en avoir une, n’est-il pas probable qu’il doit pencher dans son cœur pour la nazaréenne ? Quelques personnes qui ont de fréquentes conversations avec lui, m’ont voulu assurer qu’il penchoit vers le judaïsme. Si cela est vrai, je ne m’étonne plus de sa tranquillité. J’entrevois même qu’il y a quelque apparence qu’il soit de ce sentiment ; &