Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/348

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foiblesse impardonnable de n’en avoir pas fait un aveu autentique. D’ailleurs, notre loi épurée n’admet point de pareils déguisements. Si le bacha est juif, il faut qu’il soit de cette secte établie à Paris [1], dont tu m’as parlé dans ta quatriéme lettre, qui n’a pas en usage la circoncision, & qui ignore même d’être dans la croyance judaïque. Le bacha, ainsi que ceux de Paris, n’a aucun culte extérieur, & n’observe aucune cérémonie.

Cependant il faut nécessairement, mon cher Monceca, que Dieu ait ordonné un culte à l’homme : & puisqu’il l’a créé pour le servir, sans doute il lui a tracé les regles & la façon dont il vouloit l’être. Quel cahos affreux ne s’ensuivroit-il pas si chacun avoit une façon de penser différente sur le culte qu’on doit à la divinité ? L’esprit de l’homme sujet à s’égarer, retomberoit bien-tôt dans les erreurs de l’idolatrie. On le verroit encore, l’encensoir à la main, offrir son hommage aux animaux les plus vils, déifier des oignons, & faire naître tous les jours mille divinités dans son jardin potager.

Depuis ma lettre écrite, on assure que le bacha a recouvré une parfaite santé.

  1. Les déistes.